Shotgun Simphony

Bruxelles 2013

Shotgun symphony 

Dessin a l’encre sur papier, criblée de billes de plomb issue de tirs de chevrotine.127 x170 cm collection galila barzilai hollander .

video Shotgun duet 2

 

 

Loin de l’actualité fracassante, loin du bruit et de la fureur, Etienne de Fleurieu travaille toujours à la lisière et à l’ombre du monde apparent. Son retrait relatif dénie ici tout envie du sale coup que pourraient présupposer ses ShotGun Duet, nouvelles œuvres qui prennent pour appui le geste initial du tir à la carabine et de la grêlée de chevrotines. Rappelons-en le process : l’artiste joint des grandes feuilles de papier vierge deux à deux, les crible au pistolet de jets de grenailles qui révèlent alors, par perforations, de très légers reliefs. Sur ces cibles muettes apparaît un paysage étal de petits monticules crevés à la surface et de fins trous qui fleurissent dans la blancheur, au hasard, sur la fleur du papier meurtri. C’est sur ce champ de bataille que vient en second temps naître un faisceau pacifique de lignes formant des disque concentriques, du cœur au bord, et d’enluminures graphiques d’annotations musicales, de croches et portées établies sur l’impact des plombs. Œuvres de séduction massive, les ShotGun Duet d’Etienne de Fleurieu font allusion aussi bien à la cible qu’au disque, au radar qu’au relief abstrait des avant-gardes. On peut ainsi rappeler les fameux Rotoreliefs de Duchamp, disques de carton imprimés de spirales, dans les années 1930, que l’artiste utilisa sur des tourne- disques pour produire l’illusion du volume et du jeu optique, en des œuvres hypnotiques dont Duchamp confessait lui-même qu’elles étaient des jouets. Ou évoquer en souvenir les premières œuvres cinétiques de Tinguley qui, détourant les abstractions d’un Malévitch, mêlaient reliefs, mouvement électrique et dessin. L’impact visuel, la tendre animation et la chronologie forment à leur tour les cibles favorites des ShotGuns d’Etienne de Fleurieu. En cela, elles s’inscrivent bien à la suite d’œuvres précédentes comme les Ciels (2000), images de ciels changeants captées sur des bandes de film 8 mm et offrant une représentation spatiale du passage du temps ou le Killing Time, (2009) caisson lumineux fait de collage de bandes de films 35 mm criblé de petits trous de mitraille qui laissent filtrer la lumière. Les ShotGuns viennent ainsi rappeler le fort attachement de l’artiste aux notions de capture du réel, de visée - que les idiomes anglo-saxons expriment mieux au cinéma et dans la photographie par les termes usuels de shot et shotting- et de leurs transformations en œuvres tendrement métaphoriques, contemplatives et toujours un peu mystérieuses.

Le papier des cibles peut ainsi s’animer et se décliner vidéos numériques dans lesquelles une ligne de radar balaie l’ensemble de la surface criblée et déploie délicatement une petite symphonie réglée comme du papier à musique. Le dispositif émet alors rythmes, notes et ondes qui se chevauchent et se déclarent à mesure que la symphonie du hasard, si chère à Mallarmé, joue à plein. On regarde le ballet comme une dynamo qui égrène dessin et impact sonore. Jamais loin du réel, mais protégées, elles semblent associer le temps de la rêverie et de la création comme ombres et envers bienveillantes du monde.

Laurent Boudier, Paris, Juin 2013

shotgun remix 7

DESSIN A L’ENCRE SUR IMPRESSION JET D'ENCRE SUR PAPIER, CRIBLÉE DE BILLES DE PLOMB ISSUE DE TIRS DE CHEVROTINE, 40 X 40 CM

Video shotgun remix 7

SHOTGUN SYMPHONY 

DESSIN A L’ENCRE SUR PAPIER, CRIBLÉE DE BILLES DE PLOMB ISSUE DE TIRS DE CHEVROTINE.120 X120 CM COLLECTION privée.